Pascal Gemperli : un parcours inspirant vers la médiation internationale

Dans cette interview, Pascal Gemperli explique comment la LegalTech et les méthodes alternatives de résolution des conflits peuvent rendre la justice plus accessible. Il souligne que l'expérience internationale et la formation continue sont des éléments clés qui, grâce à l'utilisation d'outils modernes, peuvent transformer la résolution des conflits et promouvoir la paix.


Thèmes : Médiation, LegalTech, résolution des conflits
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Temps de lecture : 2-3 minutes.

En juin 2024, Pascal Gemperli, médiateur reconnu et fondateur de Gemperli Consulting Sàrl, a partagé son parcours et ses expériences dans le domaine de la médiation et de la LegalTech. Son intervention a offert des perspectives précieuses et des conseils pratiques, notamment pour les professionnels du droit en Suisse.
 

Bonjour Pascal. Pourriez-vous nous parler de votre parcours depuis la création de Gemperli Consulting jusqu'à devenir un médiateur reconnu par les tribunaux cantonaux suisses et les instances internationales ?
 

Depuis mes études d’ingénieur à la HES en communication-engineering-management, j'ai aspiré à m'engager dans la coopération au développement, un objectif que j’ai réussi à atteindre peu de temps après l’obtention de mon diplôme. J’ai travaillé près de deux ans au Maroc pour le SECO, suivi de six mois aux Nations Unies à Vienne, avant de rejoindre une fondation à Genève spécialisée dans la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité.

C'est lors de mon séjour au Maroc que j'ai complété mes études par un MAS à distance en études de paix et de conflits de l'Université de Hagen en Allemagne. Le module sur la médiation m’a immédiatement captivé :

"Ah oui, on peut résoudre des conflits à l’amiable, et il existe même une méthode pour cela ! Mais que attend le monde ? - Pascal Gemperli"

Je l’admets, cette réflexion traduisait la naïveté de ma jeunesse, mais elle marquait également le début de ma carrière en tant que médiateur. De retour en Suisse, je me suis formé selon les règles de la Fédération Suisse de Médiation et je me suis lancé en tant qu’indépendant en 2012. À partir de là, il s'agissait de construire, de s'intégrer dans des réseaux, de faire du porte-à-porte, d’apprendre à développer une entreprise. Et surtout, de faire preuve de persévérance.

En 2017, j’ai fondé ma société à responsabilité limitée (Sàrl) avec ma femme qui m’a rejoint dans l'aventure. Nous avons structuré le désordre initial, créé des processus et commencé à développer une véritable entreprise.
 

Vos compétences en coaching interculturel et exécutif semblent essentielles à votre pratique. Comment ces compétences se manifestent-elles concrètement dans vos sessions de médiation ?
 

Le coaching et la médiation présentent de nombreuses similitudes en termes de posture et de techniques. Lors de ma formation de coach en 2015, j'ai retrouvé de nombreux aspects familiers, ce qui a enrichi ma pratique de médiateur. Toutefois, il existe deux différences fondamentales entre les deux disciplines : la relation est trilatérale en médiation et bilatérale en coaching. De plus, en coaching, le client aborde avec un objectif spécifique, tandis qu'en médiation, il vient avec un problème, notamment conflit.
 

Depuis sa création en 2007, Gemperli Consulting a établi une forte réputation. Quelles sont les valeurs et services clés qui définissent l'identité de votre entreprise ?
 

Nous sommes experts en ADR (alternative dispute resolution), et depuis 3 ans en ORD (online dispute resolution) et LegalTech, notamment avec le développement de amiable.ch et le récent rachat de easydivorce.ch, le dernier étant un pionnier mondial, créé en 2007.
Notre mission principale est de promouvoir la paix, de résoudre les conflits, et ainsi de simplifier la vie des gens.
 

En fondant æ-Centre, vous avez clairement une vision pour la paix en Afrique du Nord. Pouvez-vous nous décrire les objectifs spécifiques que vous aviez en tête et comment vous mesurez leur impact ?
 

Nous avons fondé le ae-Centre le 21 septembre 2007, à l'occasion de la Journée internationale de la paix, en collaboration avec Johan Galtung, pionnier des sciences de la paix en tant que discipline universitaire et médiateur international reconnu. Ses théories ont fortement influencé mon MAS à l'université de Hagen. Initialement, notre ONG était nommée Institute for Conflict Transformation and Peacebuilding (ICP), et nous menions des projets dans les Balkans, dans la région du Haut-Karabakh et au Maroc, en plus d'offrir un CAS en médiation accrédité par l'Université de Bâle. En 2016, nous avons choisi de concentrer nos efforts sur le Maghreb, où nous dirigeons actuellement des projets de médiation minière (« company-community-mediation », entre entreprises minières et communautés locales) et de prévention de la violence au Maroc et en Tunisie.

À l'origine, notre organisation était une sorte de start-up associative. Nous avons débuté par l'organisation d'une conférence à titre personnel avec Johan Galtung, qui a remporté un tel succès que nous avons décidé d'en faire une formation. Cette initiative a donné naissance à la formation accréditée par l'Université de Bâle. Par la suite, nous avons reçu des demandes de l'étranger, que nous avons soumises avec succès à nos bailleurs de fonds, marquant ainsi une évolution très organique de notre projet.
 

Dans un monde juridique en évolution, quel est le rôle de la médiation face aux défis des litiges internationaux et des barrières culturelles ?
 

L'évolution la plus marquante dans le domaine juridique est indubitablement celle des LegalTech. La pression sur les acteurs du secteur est intense : il s'agit de faire plus avec moins. Le contexte s'avère de plus en plus complexe, alors que les budgets sont revus à la baisse. Aujourd'hui, la technologie offre une solution à ce problème, mais on observe un certain conservatisme de la part des acteurs traditionnels. Toutefois, au cours des vingt prochaines années, le monde juridique connaîtra davantage de changements que lors des deux cents dernières années.

Les LegalTech présentent également un autre avantage, sur lequel nous misons principalement avec amiable.ch et easydivorce.ch : elles renforcent l'accès à la justice. Pour de nombreuses personnes, le monde juridique est perçu comme inaccessible : trop complexe, trop coûteux, trop risqué. Les LegalTech, surtout lorsqu'elles sont combinées à des méthodes alternatives de résolution des conflits, telles que l'online dispute resolution, rendent la justice plus accessible, justice au sens moral du terme.

En ce qui concerne les litiges internationaux et les barrières culturelles, la médiation offre également un énorme avantage. Par exemple, je suis accrédité pour mener des médiations dans le cadre des procédures de La Haye en cas d'enlèvement international d'enfants. Pour les parties concernées, c'est un immense soulagement de pouvoir transcender les contraintes juridiques et de se concentrer uniquement sur leurs désirs et besoins. Une fois la solution trouvée, nous la formalisons pour que le juge puisse l'adopter officiellement. Il en va de même pour les litiges commerciaux : si l'on ignore quelle juridiction de quel pays s'applique, la situation peut rapidement devenir très complexe. Mais, plus fondamentalement, il s'agit d'une question de philosophie. En adoptant une approche juridique traditionnelle, on se place dans une logique de noir et blanc, de droit ou de tort, avec un gagnant et un perdant. La médiation, en revanche, adopte une approche radicalement différente.
 

En tant que professionnel expérimenté, quelle évolution prévoyez-vous dans les méthodes de résolution alternative des conflits ?
 

Dans un monde de plus en plus complexe, avec des tribunaux de plus en plus surchargés et l’absence d’accès à la justice pour de nombreuses personnes (4 milliards selon l'OCDE), les méthodes alternatives de résolution des conflits continueront sans doute à se développer au bénéfice des parties concernées. Rien qu'en Suisse, au cours des trois dernières années, nous avons assisté à la naissance d'une loi sur la médiation à Neuchâtel et une autre à Genève, à l'extension de l'assistance judiciaire pour inclure la médiation dans le canton de Vaud, ainsi qu'à de nombreuses autres évolutions de ce genre. Nous sommes témoins d'un véritable tournant dans ce domaine.
 

Pour nos lecteurs envisageant une carrière similaire, pourriez-vous décrire une journée typique dans votre profession et ce que vous y trouvez le plus gratifiant ?
 

Une journée typique pour un médiateur consiste à être confronté à des blocages totaux, à des situations où l'on pense : « Ils ne pourront jamais sortir de cette impasse. », à des larmes. C'est dans ces moments qu'il faut faire confiance au processus, se rappeler que les lignes rouges proclamées et opposées de manière frontale pourront être déplacées ou contournées, qu'au final, une solution émergera à laquelle personne n'avait pensé. Il y aura des poignées de main et parfois des étreintes, c'est là toute la magie de la médiation.

Mais surtout, je recommanderais à vos lecteurs de consulter notre formation en médiation sur www.formation-mediation.ch.

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